Les usages modaux de l’imparfait français et du simple past anglais : quand le temps produit de la modalité

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titleLes usages modaux de l’imparfait français et du simple past anglais : quand le temps produit de la modalité
start_date2008/03/17
schedule15h30-17h
onlineno
summaryL’analyse linguistique a très souvent pointé le lien fort qui existe entre temps passé et modalité. Ainsi, dans de nombreuses langues, la « distance temporelle » exprimée par les temps verbaux du passé (par rapport à T0) est susceptible de signifier en discours une « distance modale » (Lyons 1977, Fleischman 1989, Fleischman 1995, Declerck 2005, Barceló et al. 2006). Je me focaliserai, dans la présente étude, sur le français et l’anglais, deux langues ou des temps comme l’imparfait et le simple past peuvent servir à exprimer deux types de modalité : (i) une modalité épistémique : le procès est présenté comme improbable (exemples (1) and (2)) ; (ii) une modalité illocutoire : l’énonciateur(-locuteur) est plus (exemples (4)) ou moins (exemples (3)) impliqué dans son acte illocutoire, produisant ainsi de la politesse : (1) Emploi hypothétique : a. Si j’avais le temps, je viendrais te voir plus souvent. b. If I had time, I would visit you more often. (2) Emploi optatif : a. Si seulement j’étais riche ! b. If only I was rich ! (3) Emploi atténuatif : a. Je voulais vous inviter à dîner. b. I thought about asking you to dinner. (4) Emploi forain : Qu’est-ce qu’elle voulait la petite dame ? (What does she want (litt. was she willing/wanting), the little lady ?) J’essaierai dans ma présentation de rendre compte de la production de ces deux types de modalité (épistémique and illocutoire) associées à l’imparfait et au simple past grâce aux notions de monologisme et de dialogisme. La notion de dialogisme, introduite par Bakhtine, décrit le dialogue interne qui s’établit au sein d’un énoncé entre l’énonciateur-locuteur et un énonciateur secondaire. Par exemple, le discours rapporté (c’est-à-dire Il a dit qu’il était trop occupé) est typiquement dialogique car il implique deux énonciateurs : (i) le locuteur et (ii) un énonciateur secondaire responsable du discours raporté (en l’occurrence Je suis trop occupé). À l’inverse, les énoncés monologiques ne sont le fait que d’un seul énonciateur : le locuteur (par exemple Je suis trop occupé). Je ferai l’hypothèse que l’imparfait et le simple past sont dialogiques dans leur emploi modal épistémique, tandis qu’ils sont monologiques dans leur emploi modal illocutoire : (i) en emploi modal dialogique (exemples (1) and (2)), l’énonciateur-locuteur se défausse de la responsabilité de l’énoncé sur un énonciateur secondaire situé dans le passé, conférant ainsi au procès décrit un caractère improbable ; (ii) en emploi modal monologique (exemples (3) and (4)), le procès est situé dans le passé afin : - de présenter l’acte de langage de façon indirecte (exemples (3)) : l’implication non actuelle de l’énonciateur locuteur permet d’atténuer le caractère péremptoire d’une énonciation au présent et produit donc de la politesse ; - ou de reconnaître, dans une interaction commerciale, le besoin/désir du client interlocuteur afin d’anticiper sa demande (exemple (4)) : l’anticipation du besoin/désir du client implique un engagement plus fort du locuteur dans son offre, produisant ainsi également de la politesse. Ainsi, l’opposition dialogisme/monologisme permet d’améliorer et de compléter l’explication fondée sur la métaphore de la distance temporelle en rendant compte de la différence entre les deux types de modalités (épistémique et illocutoire) pouvant être produits par la temporalité passée de l’imparfait français et du simple past anglais.
responsiblesDétrie