Y a-t-il une logique du sensible ?

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titleY a-t-il une logique du sensible ?
start_date2010/03/06
schedule09h45-17h
onlineno
detailsséance 4
summaryMarc Chemillier (EHESS, Paris) "Musique et mathématiques naturelles" L'étude de certaines activités de tradition orale comme le tissage, les arts décoratifs ou la musique, révèle un goût de l'esprit humain pour l'étude de propriétés mathématiques remarquables rejoignant ce que Levi-Strauss appelait "l'appétit de connaissance objective" caractéristique de l'esprit humain dans toutes les cultures, et applicable en particulier a la musique. On en montrera quelques exemples conduisant à introduire et préciser le champ que recouvre l'expression "mathématiques naturelles" (cf. l'ouvrage paru sous ce titre chez Odile Jacob, 2007). Franck Jedrzejewski (CEA, Paris) "Logiques ou topo-logiques ?" L'idée que la logique puisse expliquer partiellement ou en totalité un acte ou un geste créateur, ou une simple expression produite par l'homme, a eu sur le développement des sciences humaines et artistiques des conséquences dont on commence seulement à mesurer les effets. La notion kantienne de logique transcendantale a mis l'accent sur une logique qui aurait affaire aux lois de l'entendement et chercherait en même temps l'origine de nos connaissances par une étude des objets a priori dont la représentation serait maculée de formes spatio-temporelles de la sensibilité. À l'opposé, Husserl redéfinit l'entendement par sa fonction subsumante et pose une intuition catégoriale. La découverte des logiques intuitionnistes remet en cause le principe du tiers exclu. De nouvelles logiques, souvent discutées et critiquées, proposent des interprétations renouvelées de la théorie de la connaissance (logiques modales, linéaires, paraconsistantes, etc.), avec toujours en arrière plan, l'idée qu'il existe une vérité des formes artistiques, ce dont témoigne la célèbre phrase de Cézanne que commente Derrida : « Je vous dois la vérité en peinture, et je vous la dirai ». Cette notion même de vérité, si elle n'est plus comprise comme une fonction de valuation qui partage le vrai du faux, mais comme adaequatio rei et intellectus est la cible de toutes ces logiques. À quoi bon appliquer des calculs formels et des règles d'inférences à la création artistique pour de si piètres résultats ? Quelles démonstrations cherche-t-on ? Certes, l'homme ne peut agir spontanément indépendamment de sa pensée. S'il laisse dans son oeuvre des traces raisonnables, il ne s'agit que de formes fragmentaires, insuffissantes pour élaborer une reconstitution logique cohérente universellement valable pour tout créateur. Ces fragments, qui nous éloignent d'une conception logique, nous les percevons comme des pans raisonnants de l'activité créatrice, des espaces abstraits où convergent des lieux nodaux et des singularités de torsions intérieures, à partir desquels le musicologue ou le philosophe cherchera à mettre en évidence, non pas des structures logiques, mais des universaux topologiques. Gérard Assayag (IRCAM, Paris) "Concurrence du logique et du sensible dans l'informatique musicale" L'informatique musicale est certainement au coeur de la dualité logique/sensible, qu'elle matérialise d'ailleurs sous les catégories, certes imparfaites, d'informatique symbolique et numérique. Les descripteurs du signal intègrent de plus en plus des modèles perceptifs, rendant compte de certaines qualités sensibles ; la logique du signe préside aux algorithmes d'analyse, de génération et plus généralement de résolution de problèmes appliques au champ musical. Dans la dialectique qui lie ces deux grands paradigmes de l'informatique, la question se pose moins en termes de précédence de l'un des deux termes par rapport à l'autre que d'interaction fine. Par exemple, dans la modélisation du style et de l'improvisation, une structure logique peut être induite de la succession des hauteurs, mais aussi, à une échelle plus microscopique, de la succession des timbres représentés par des descripteurs perceptifs. Comment conduire une exploration concurrente de ces modèles pour simuler la cohérence à la fois solfégique et timbrale, voilà le genre de défis actuellement posés à l'informatique musicale. Cette concurrence (un parallèlisme où les deux termes se contraignent du point de vue de leurs régimes respectifs) nous semble d'ailleurs une métaphore plus productive que celle de l'antériorité. Jean-Luc Leroy (Université de Provence, IUFM d'Aix-Marseille) "Des logiques et des sensibilités en musique : tour d'horizon et perspective" Sensibilité et logique sont deux concepts souvent posés comme antinomiques. Mais cette antinomie n'estelle pas elle-même l'expression d'une certaine forme de « logique » de la pensée, en partie culturellement déterminée, qui tend à nous faire appréhender le réel dans un cadre binaire antithétique ? Car l'un comme l'autre de ces deux termes n'est rien moins que monosémique. De quelle « logique » parle-t-on ? De la logique formelle, de la logique des sentiments, de la logique de l'action, de la bio-logique ? Et de même, de quelle sensibilité ? Peut-être alors convient-il de sortir de ce cadre binaire pour saisir la fluidité du phénomène musical. Une première approche consistera à explorer l'expression de cette polysémie dans les différentes tentatives pour rendre compte de ce phénomène. Une seconde approche s'attachera à penser les conditions de l'articulation de ces différentes perspectives.
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