Evolution clonale : les cellules cancéreuses sont-elles des populations darwiniennes paradigmatiques ?

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titleEvolution clonale : les cellules cancéreuses sont-elles des populations darwiniennes paradigmatiques ?
start_date2016/01/26
schedule15h30-17h
onlineno
summaryAu sein d'une tumeur, où les ressources sont limitées, des cellules cancéreuses se reproduisent avec variations, et sont par conséquent inévitablement sujettes à un processus de sélection naturelle (on parle à ce sujet d'évolution clonale). Or, qu'il y ait sélection naturelle n'implique pas nécessairement que ce processus soit fondamental à notre compréhension des cellules cancéreuses et de leurs transformations. L'un de nous a précédemment soutenu que les cellules cancéreuses ne sont pas des populations darwiniennes paradigmatiques (Godfrey-Smith 2009), qu'elles présentent peu ou pas d'adaptations complexes, et par conséquent que l'architecture initiale des cellules joue un rôle bien plus grand que la sélection naturelle dans l'explication et la prédiction de leurs caractéristiques et transformations (Germain 2012). Dans un premier temps, nous résumerons brièvement ces arguments. Dans un second temps, nous explorerons les implications cliniques de cette thèse. Nous soutiendrons que l'organisation cellulaire du tissu cancéreux est un facteur déterminant de l'évolution clonale. L'évolution clonale peut prendre deux formes bien distinctes chez les patients, elle peut se faire de manière linéaire ou branchée. Dans le premier cas, les mutations s'accumulent de manière séquentielle dans le dernier clone alors que dans le second cas différents sous-clones sont sujets à une évolution parallèle. En poursuivant l'argument de Pierre-Luc Germain (2012), nous montrerons que la quantité et l'état prolifératif des cellules souches cancéreuses ainsi que le degré de plasticité cellulaire au sein de la population cancéreuse sont des facteurs déterminants dans l'architecture clonale (c'est-à-dire dans le fait que l'évolution se produit de manière linéaire ou branchée). Une meilleure compréhension de l'architecture clonale peut avoir des bénéfices cliniques en particulier pour les transformations des leucémies chroniques en leucémies aiguës et, plus généralement, pour la gestion des stades pré-malins. Pour finir, nous reviendrons sur la question de savoir si des adaptations complexes sont possibles à l'échelle supra-cellulaire plutôt qu'à l'échelle des cellules cancéreuses elles-mêmes. En se basant sur une approche multi-niveaux, Lean et Plutynsky (2016), ont récemment soutenu que les “interactions coopératives” entre les cellules de certaines tumeurs sont telles que ces dernières devraient être considérées comme des entités “intégrées”, elles-mêmes sujettes à la sélection naturelle, et dont le développement représente une adaptation complexe. Nous discuterons la possibilité d'une telle sélection sous deux angles. D'abord, nous examinerons à quel point le développement des métastases (principal exemple utilisé par les auteurs) peut être considéré comme un cas de sélection à un niveau supra-cellulaire. Ensuite, nous utiliserons à nouveau le cadre conceptuel développé par Godfrey-Smith pour évaluer, plus généralement, la plausibilité d'adaptations complexes à ce niveau.
responsiblesPontarotti, Dutreuil