Organismes, économies animales, constitution de la biologie : Ecrire l’histoire du vitalisme

old_uid12136
titleOrganismes, économies animales, constitution de la biologie : Ecrire l’histoire du vitalisme
start_date2016/11/21
schedule16h-18h
onlineno
summaryLe problème du statut du vitalisme dans l'histoire de ce qu'on appelait à l'époque de Canguilhem et Jacques Roger, la « pensée biologique », est connu. Le vitalisme désignerait la doctrine, ou ensemble de doctrines, qui serait aux limites (ou aux marges ?) de la pratique scientifique raisonnable. Selon cette vision commune et encore assez répandue (plus encore dans le contexte anglophone qu'en Allemagne ou en France, où certaines intuitions biophilosophiques font encore partie d'un patrimoine quasi-national, avec des accents kanto-hégéliens, bichato-bernardiens, etc.), le vitalisme consiste à tricher : à faire entrer en jeu des forces vitales mystérieuses, au sein d'une étude prétendument scientifiquement de la nature vivante (en biologie, en embryologie, en médecine, en physiologie, etc.). On doit par exemple à Francis Crick une célèbre formule sur les vitalistes, « charlatans » contemporains (cranks) : «  à ceux d’entre vous qui seraient vitalistes, je fais ce pronostic : ce que tout le monde croyait hier, et que vous croyez aujourd’hui, demain seuls les charlatans (cranks) le croiront » (Crick 1966). J'ai tenté plusieurs fois de dissiper ou critiquer cette intuition courante, surtout en essayant d’historiser la question (Wolfe & Terada 2008, Wolfe & Normandin, dir. 2013), afin de montrer qu’il existe plusieurs formes de vitalisme (Wolfe 2011, 2015a). Au minimum, un vitalisme ‘substantiel’, qui pose l’existence d’une force ou principe vital comme substance (au même titre que le reste des choses existantes au monde) : c’est typiquement la position de Stahl ou de Driesch (ibid.). Puis un vitalisme ‘fonctionnel’, qui cherche à saisir les propriétés fonctionnelles de systèmes vivants, sans transmuer ces propriétés en un fondement ontologique : c’est typiquement la position des vitalistes de Montpellier mais aussi de Claude Bernard, y compris telle qu’elle est reprise de nos jours par W. Bechtel (Bechtel 2007, 2013). Enfin, j’ai tâché de montrer ailleurs que chez Canguilhem, à la suite de Kurt Goldstein (mais prolongeant une intuition kantienne, que l’on retrouvera également chez le Dennett du ‘intentional stance’), on trouve une sorte de vitalisme ‘cognitif’ ou ‘constructiviste’, au sens où il se fonde sur un acte de construction mentale (Canguilhem 1965 ; Wolfe 2013 & 2015b).
responsiblesBognon-Küss