Approche translinguistique de l’agrammatisme dans l’aphasie de Broca. Universalité et/ou diversité des symptômes en fonction des propriétés structurales des langues

old_uid14776
titleApproche translinguistique de l’agrammatisme dans l’aphasie de Broca. Universalité et/ou diversité des symptômes en fonction des propriétés structurales des langues
start_date2014/12/05
schedule10h30-11h30
onlineno
location_infoA, salle B011
detailsentré libre.
summaryDepuis les travaux de pionnier de Roman Jakobson, certains linguistes — assez peu nombreux, il est vrai — n’hésitent pas à examiner les différents symptômes observables dans le comportement verbal des aphasiques à la suite de lésions cérébrales localisées, le plus souvent, dans l’hémisphère gauche. Leur objectif premier dans une telle entreprise : glaner des “évidences externes” susceptibles de “valider”, dans les bons cas, l’architecture structurale et les concepts opératoires proposés par telle ou telle théorie linguistique pour rendre compte de la structure interne d’une langue naturelle. D’un point de vue psycholinguistique et neuropsychologique cette fois, l’étude des mêmes phénomènes pathologiques vise à caractériser l’architecture fonctionnelle du langage dans le cerveau/esprit humain. En effet, à partir de l’observation de “doubles dissociations” dans le comportent verbal des aphasiques, les neuropsycholinguistes tentent non seulement de mieux appréhender le déterminisme sous-jacent des manifestations pathologiques de surface présentées par tel ou tel  patient mais aussi, à un niveau plus général, d’identifier les représentations et les processus à l’oeuvre dans la production et la compréhension du langage chez le sujet normal. Même si une telle extrapolation — du pathologique vers le normal — peut surprendre le non-spécialiste, elle est rendue possible et légitime par le fait, bien établi dorénavant, que les symptômes linguistiques relevés chez l’aphasique n’ont rien d’aléatoire, qu’ils ont au contraire leur logique sous-jacente, une logique sous-jacente qui, au surplus, est qualitativement la même que celle qui préside à l’engendrement des “erreurs de performance” que l’on peut observer chez les sujets normaux (Fromkin, 1973 ; Nespoulous, 1973 ; Garrett, 1980). Dans leur tentative d’identification des structures et des processus du langage en général, les deux démarches, complémentaires, ci-dessus souffrent toutefois d’une grande limitation : jusqu’à tout récemment, la majorité des travaux aphasiologiques ont porté sur un tout petit nombre de langues — l’anglais, le français, l’allemand, le néerlandais et l’italien — fortement apparentées au surplus. Or, face à la diversité structurale des langues, d’une part, et à l’unité postulée du cerveau de l’homme et de sa faculté “langage”, d’autre part, un double question se pose, de toute évidence, en présence de symptômes émanant d’aphasiques appartenant à des communautés linguistiques aussi différentes que possible : - qu’est-ce qui est, ou serait, cérébralement motivé — c’est-à-dire commun aux aphasiques parlant des langues fortement contrastées au plan structural — ? - qu’est-ce qui est, ou serait, linguistiquement motivé — c’est-à-dire variable d’une langue à une autre, en fonction des propriétés structurales de chacune d’elles ? C’est pour tenter de donner un début de réponse à ce double questionnement sur le rôle respectif du “hardware” cérébral et du “software” linguistique dans l’engendrement des symptômes aphasiques, que plusieurs programmes de recherche en Sciences Cognitives ont été lancés, au début des années 80, dans le droit fil de la réflexion de Dan Slobin. C’est de l’un d’eux (le “ Cross-Linguistic Aphasia Study”) — lancé par Lise Menn et Loraine Obler en 1982 — que nous parlerons brièvement et partiellement dans notre exposé. Son objet : étudier intra-linguistiquement et comparer inter- ou trans-linguistiquement dans 14 langues différentes les perturbations observées dans la gestion des morphèmes grammaticaux, libres et liés, telles qu’on peut les rencontrer dans ce qu’il est convenu d’appeler, en clinique, l’agrammatisme (Menn & Obler, 1990).
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